Dernière sortie pagres 2018

Publié le vendredi 8 février 2019 par Stéphane Charles
  • Technique de pêche

 

Magnifique pagre pris par Nicolas avec son montage qui s’est avéré très efficace !

 

2018 a été particulièrement compliquée dans le sud de la France pour la pêche en bateau. Ce fut en effet une année très venteuse où les créneaux météo se sont avérés rares. La météo était si changeante qu’il était impossible de programmer une session pêche plusieurs jours à l’avance. L’automne est une excellente saison pour la pêche des beaux pagres et nous attendions avec impatience une accalmie du vent. D’autant plus que l’hiver arrivait à grand pas et que nous savions déjà que ce serait une de nos dernières sorties avant le retour des beaux jours. Ce créneau favorable arriva enfin le 2 décembre.

 

Un montage tataki permet de faire rapidement quelques calamars

 

Nous nous donnons rendez-vous très tôt le matin afin de profiter au maximum de notre sortie – les jours ayant beaucoup raccourci. Alors que nous sortons du port, l’aube commence juste à apparaître. Nous avons une grosse provision de bibis mais nous avons également prévu de faire quelques calamars pour compléter nos appâts. Les calamars venus à la côte durant la nuit repartent vers les abysses dès que le jour commence à se lever. Nous nous arrêtons donc dans quelques dizaines de mètres de profondeur pour les intercepter. Nous pratiquons une pêche verticale en tataki avec des trains de petites turluttes et nous réussissons à en toucher quelques uns rapidement. Nous repartons aussitôt pour nous rendre sur le poste où nous espérons toucher des pagres. Inutile de s’attarder. Les jours sont courts et il ne faut pas gâcher de précieuses heures de pêche.

 

Refaire à chaque sortie le nœud de jonction tresse / flurocarbone avec un nouveau bas de ligne est vivement recommandé pour éviter les déconvenues !

 

Alors que nous nous rendons sur le spot, nous en profitons pour changer nos bas de lignes – ces derniers ayant souffert avec la prise de beaux poissons lors de la dernière session. C’est d’ailleurs ce que tous les pêcheurs devraient faire avant chaque sortie ! Pour le raccord entre la tresse et le fluorocarbone, nous utilisons un outil à nœuds : le Rotto Knotter Stonfo.

 

Rotto Knotter Stonfo

 

Il s’agit d’une bobine qui permet de faire un nœud ressemblant à un FG Knot. La tresse est enroulée autour du bas de ligne avec une forte tension prédéfinie par la molette. Deux bobines de poids différents seront utilisées en fonction de la force de la ligne. La multiplicité des tours en spires jointives permet ainsi de répartir la force sur toute la surface du bas de ligne, sans l'effet de cisaillement rencontré généralement dans ce type de raccord. Résultat : un nœud parfait à la résistance optimale (plus de perte de puissance). D'une finesse inégalée, celui-ci passe parfaitement dans les anneaux. Il est ainsi possible d'avoir de très longs bas de ligne.

 

L’enroulement par spires jointives crée une connexion 100% fiable !

Ce nœud ultra robuste offre également l’avantage de parfaitement passer dans les anneaux car il est peu épais.

 

Cet accessoire demande un peu de pratique et le nœud demande un peu de temps. Néanmoins, pour l’avoir testé sur une machine spécifique, nous savons que cette jonction permet d’avoir une résistance correspondant à 100 % à celles des fils utilisés. Cette perte de temps est donc largement compensée par la fiabilité du nœud.

 

Le nœud de raccord réalisé avec un rotto knotter vous assure d’avoir 100 % de résistance pour votre raccord tresse / bas de ligne.

 

A notre tresse 25 à 30 lb, nous aboutons du fluorocarbone 50/100. Le spot que nous allons pêcher présente de très gros spécimens et nous avons déjà cassé de nombreuses fois en 40 et même en 45/100 ! Nous utilisons 6 à 7 m de fluorocarbone – autant par souci de discrétion que pour éviter les casses liées aux frottements sur les roches lors du combat. Ce matériau est en effet très résistant à l’abrasion et limite les coupes sur les fonds rocheux.

 

 

Le montage

 

Ce montage peut être réalisé facilement sur le bateau. Les nœuds de ligature ont été ici remplacés par des nœuds d’arrêts un peu plus fragiles mais néanmoins suffisamment résistants.

L’empile est bien perpendiculaire au bas de ligne.

 

Nous avons essayé de multiples montages et combinaisons pour la pêche du pagre. Nicolas souhaite cette fois-ci essayer un nouveau type de montage plus résistant afin de tenter de battre son record personnel. Bien qu’il en ait fait pour chaque pêcheur, nous profitons du temps de trajet jusqu’au spot pour en faire d’autres de secours.

 

Montage pagres en pêche profonde de Nicolas Petit

 

Ce montage est constitué d’une tête de ligne de 150 cm en fluorocarbone 50/100 et d’empiles en 45/100. L’avantage est autant de pouvoir combattre de beaux spécimens que de bénéficier de la rigidité naturelle de ce matériau dans de tels diamètres. En pêche profonde, les descentes et remontées successives ainsi que les puissants courants sous-marins peuvent en effet causer le vrillage des éléments du montage et leur emmêlement. Pour les mêmes raisons, les empiles sont également volontairement courtes – ce qui n’effraie pas les poissons dans les pêches très profondes. Avec les meilleures conditions, celles-ci pourront faire 60 cm. En présence de courants marqués, il sera recommandé de les raccourcir jusqu’à 40 cm.

 

Émerillon rolling percé Flashmer

 

Dans son montage, Nicolas utilise un émerillon rolling percé Flashmer pour la fixation des empiles. Ce petit accessoire est très ingénieux ! En effet, le trou permet de l’enfiler directement sur le bas de ligne. Il offre de nombreux avantages. Ainsi, en disposant des perles de chaque côté et en bloquant le tout avec des nœuds de ligatures collés, la rotation des empiles autour du bas de ligne est parfaite. De même, l’œillet du rolling permet à l’empile de parfaitement tourner sur elle-même – limitant ainsi de façon considérable les problèmes de vrillages si fréquents en pêche profonde. L’autre intérêt de ce rolling percé est que son œillet possède un profil pointu en pointe. Contrairement à un œillet rond, celui-ci maintient donc le nœud en place. L’empile reste ainsi parfaitement dans l’axe de l’émerillon. L’avantage est ici que le rolling écarte parfaitement les empiles du bas de ligne dans un angle de 90 ° - limitant ainsi considérablement les problèmes d’emmêlements.

 

Perles phosphorescentes Flashmer

 

Des perles phosphorescentes attireront sur de grandes distances les poissons dans l’obscurité des abysses vers vos appâts.

 

Hameçons ronds 3310 F Gamakatsu : une référence pour les beaux sparidés !

 

Les 3310 F Gamakatsu sont des hameçons de référence pour la pêche de tous les beaux sparidés. De forme ronde et possédant une hampe courte, il correspond parfaitement à leur gueule dentée. Bien qu’étant très forts de fer – et d’autant plus en grandes tailles -, ils disposent d’une pointe au piquant redoutable capable de percer les plus forts cartilages.

 

Lamelle de calamar frais découpé en forme de feuille de saule

Bibi esché sur l’hameçon

 

Ils sont à palette, ce qui est un avantage pour escher les bibis ou les tentacules en les faisant remonter sur le fil. La palette permettra également de piquer plus facilement une lanière de calamar. Celle-ci gagnera à être découpée en forme de feuille de saule aux ciseaux. Nous les utilisons en la piquant à deux ou trois reprises en faisant passer l’hameçon afin de créer une vague en leur milieu. L’avantage de cette forme est qu’elle ondule dans le courant de façon hyper attractive en émettant des vibrations – ce qui attire les prédateurs sur de grandes distances.

 

Bibis Normandie Appâts

 

 

Une pêche productive !

 

Comme d’habitude sur ce poste, les périodes d’activité sont temporaires. Ainsi, il est possible de passer plusieurs heures à pêcher en ne touchant que quelques poissons. Puis, sans raison, les touches peuvent s’enchaîner très rapidement pendant plusieurs heures. Il n’est alors pas rare que deux ou trois pêcheurs soient en combat en même temps. Les pagres sont des poissons grégaires vivant en bancs parfois denses. Il semble donc que leur période alimentaire soit commune et qu’ils mangent en même temps. Le système de prédation en meute est bien connu pour les pélagiques ou encore pour les bars mais reste moins connu pour les sparidés prédateurs. Mais sur le terrain en action de pêche, nous avons ainsi remarqué que les pagres ou même les pageots s’alimentaient de concert. Il est ainsi évident qu’ils chassent ensemble leurs proies – ce qui est une stratégie beaucoup plus productive pour chaque individu. Le plus étonnant est que même d’autres espèces telles que les chapons ou les dorades roses semblent rentrer en frénésie alimentaire dans le même temps.

 

En pêche profonde, les sébastes sont des poissons fréquemment touchés

 

Ainsi, c’est exactement ce qu’il s’est passé ce jour-là. Alors que nous n’avions touché que des sébastes et quelques pageots acarnés durant plusieurs heures, les touches se sont soudainement enchaînées. Les multiples échos en forme d’arc sur le sondeur montraient bien des carnassiers en train de chasser dans les boules de poissons fourrage.

 

En quête de records, Nicolas est un peu déçu d’une aussi petite dorade rose…

…et il faudra que le photographe fasse des grimaces pour lui arracher un sourire !

 

Nicolas et Daniel connaissent très bien ces pics d’activité et ils pestent dès qu’ils touchent des poissons qu’ils jugent de trop petites tailles tels que des sébastes, des pageots acarnés ou des dorades roses. Ils sont là pour les pagres – et les plus gros possibles ! Ils estiment que ces « petits poissons » leur font perdre un temps précieux alors qu’ils savent que les prédateurs sont juste en dessous du bateau. En effet, remonter un poisson de 150 m de fond jusqu’à la surface ne se fait pas en quelques minutes. Et c’est d’autant plus rageant quand le partenaire de pêche est en combat avec un pagre – preuve de leur présence !

 

Un doublé avec un pageot acarné et une dorade rose qui n’ont visiblement pas l’air de satisfaire Nicolas en quête de pagres !

 

Ils cherchent alors à gagner la moindre seconde possible pour pouvoir enfin pêcher le poisson visé. Ainsi, le journaliste photographe à bord aura alors bien du mal à les faire poser en photo avec chaque prise. D’âpres négociations s’engagent entre les protagonistes. Nicolas marchande avec un « Ok mais tu fais vite. Une photo et ca ira. Ils sont dessous ! ».

 

Visant également le pagre, Daniel est dans le même état d’esprit que Nicolas concernant ce pageot acarné !

 

Daniel parlemente de façon plus catégorique : « C’est trop petit. Ca ne mérite pas la photo. On perd du temps ! ». Il s’empresse aussitôt de se débarrasser du poisson. Dans tous les cas, le journaliste passant de l’un à l’autre avec son reflex en bandoulière aura bien du mal à toucher de son côté du poisson – sa canne étant laissée le plus souvent sans surveillance et ses appâts ayant été grignotés depuis longtemps. Les prises s’enchaînent mais toujours pas de pagres – au grand dam de Nicolas et Daniel. Les touches diminuent soudain et une attente inhabituelle s’installe. Les pêcheurs commencent leurs conjectures : « J’espère que ce n’est pas la fin de la période d’activité comme ca s’est déjà passé ! ». D’autres cherchent à se rassurer : « Si les pagres sont arrivés, ils ont fait le ménage autour d’eux. C’est peut-être pour ca que les petits poissons ne mordent plus ». Tous les pêcheurs à bord préfèrent la seconde explication et redoublent d’attention. Et ils avaient raison !

 

Gros combat pour Nicolas !

 

Nicolas enregistre une touche phénoménale à laquelle il répond par un ferrage à la japonaise – comme à son habitude. La courbure de la canne indique une très belle prise. Mais bizarrement, on ne constate pas de coups de tête. C’est de plus très lourd ! Alors qu’il n’a pas encore pu récupérer de ligne, la canne se détend un peu et il commence à remonter sa prise. Après un long combat durant toute l’ascension, nous comprenons enfin : c’est un doublé de pagres !

 

Doublé de pagres pour Nicolas ! Notez que Nicolas avait essayé de mettre une troisième empile et que celle-ci a cédé. D’où l’intérêt de n’avoir que 2 empiles pour éviter la casse de tout le bas de ligne !

 

En posant pour la photo (cette fois-ci avec plaisir), Nicolas constate que la troisième empile qu’il avait rajoutée à son montage a cédé. « J’avais 3 pagres en fait ! Ca a cassé – même avec du 45/100. C’est le poids que j’ai ressenti au début. Comme quoi, deux empiles sont largement suffisantes. J’ai été trop gourmand ! » La casse est effectivement bien nette et les pêcheurs à bord s’accordent à dire qu’avec ces 3 poissons au bout de la ligne tirant chacun dans des directions différentes, Nicolas a eu de la chance de ne pas perdre l’intégralité du montage. C’est donc acté : on restera sur deux empiles !

 

Gros coups de tête qui font ployer la canne de Daniel. C’est bien un pagre !

 

A peine Nicolas a-t-il posé pour la photo que Daniel ferre un beau poisson. Immédiatement, les lourds coups de boutoir de son adversaire ne laissent aucun doute sur son espèce. « C’est un pagre. Regardez les coups de tête ! » clame Daniel. Le combat est néanmoins étrange avec de fortes accélérations puis des pauses où le poisson se laisse treuiller. Encore ici, ce n’est que lorsqu’il est épuisetté et monté à bord que nous aurons l’explication.

 

Daniel observe ce pagre qui a été durement attaqué lors du combat aux vues de ses blessures ! Calamars rouges ? Autres pagres ?

 

Le pagre est couvert de morsures et saigne : il a été attaqué durant le combat. Daniel l’examine et s’interroge : « Qui à pu faire ca ? D’autres pagres ? Des calamars ? Un requin ? »

 

Daniel est heureux de tenir le poisson qu’il était venu pêcher spécifiquement !

 

Nous ne le saurons jamais. Mais l’essentiel est là. Chaque pêcheur a fait son pagre et l’ambiance est soudain plus légère. L’objectif est atteint et la suite ne peut être que du bonus ! À mesure que la journée avance, le soleil réchauffe l’atmosphère. Pour une journée de décembre, les températures sont étrangement clémentes.

 

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Les pêcheurs toucheront de très nombreux sébastes

 

Chaque pêcheur à bord a fait son beau poisson et l’ambiance est détendue. Comme toujours avec les pagres, les prises se sont succédées en peu de temps avant de s’arrêter brutalement – preuve que ces poissons sont en bancs et qu’ils prospectent beaucoup de terrain en quête de nourriture. Nous prendrons d’autres espèces dont de très beaux sébastes et quelques dorades roses mais il semble qu’il n’y ait plus de pagres.

 

Pendant que Laurent pose avec un labre pris avec le montage octopus, Nicolas situé juste derrière se retrouve en combat avec un beau pagre.

 

Alors que nous envisageons déjà de partir car le jour se couche vite en cette saison, Nicolas nous alerte : « Coups de tête. Gros coups de tête… Il est beau ! » Le photographe prenant en photo Laurent posant avec un labre voit immédiatement la touche. Et en effet, la courbure de sa canne ne laisse aucun doute : il s’agit d’un gros pagre. Après un beau combat mené en souplesse avec des rushs bien contrôlés, le poisson est enfin epuisetté après la longue remontée. C’est en effet un très beau poisson. Les autres pêcheurs n’ayant enregistré aucune touche, il doit s’agir d’un individu solitaire. Un magnifique spécimen avec lequel Nicolas posera pour la photo rituelle avec un plaisir évident !

 

Le plus gros pagre de la journée pris par Nicolas. Un magnifique spécimen (nous parlons du pagre. Pas de Nicolas !)

 

Nous partons vers 16.00 h afin de ne pas naviguer de nuit. Le soleil est déjà bas et autant éviter de prendre des risques inutiles. Ce fut une excellente journée où chaque pêcheur à fait son spécimen – de quoi les rendre heureux et satisfaits. Nous discutons en souriant sur le déroulement de la journée. Un véritable contraste avec le début de la journée où la tension était palpable. Ca résume parfaitement cette journée. Au début, une attente inquiète où on se demande si on trouvera le poisson. Tous les efforts mis en œuvre pour sortir l’espèce visée et l’attente inquiète. Puis la sensation de libération après avoir enfin sorti son spécimen. Et enfin, juste après, ce sentiment de plénitude quand on constate que l’objectif est atteint. On est alors dans un sentiment de plénitude qui se rapproche du bonheur - et la camaraderie à bord l’amplifie d’autant. Et cela, seuls ceux qui l’ont vécu en pêche pourront le comprendre !